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lundi 15 mars 2010

Première analyse des résultats des régionales et perspectives d’avenir



Plus de 53 % (53,75 % selon les chiffres du Ministère de l’Intérieur) des habitants de France autorisés à voter ne se sont pas déplacés hier.

C’est historique, au sens strict, et ne peut être passé sous silence, mais au contraire, mérite une analyse lucide et posée.

Le nombre des votes blancs/nuls est de 1.98 % (résultats Min. Intérieur).

Quelques 8 % d’électeurs potentiels ne seraient pas inscrits du tout (sce Le Monde).

Démonstration est faite que les électeurs et électrices en ont assez d’être pris pour des imbéciles et des vaches à lait, et qu’ils ont décidé d’adresser à l’ensemble de la classe politique un fort signal de ras-le-bol, sinon de colère.

Qu’ils n’ont pas trouvé dans cette campagne de quoi les satisfaire intellectuellement, ni pratiquement, pour appuyer leurs luttes de chaque jour contre les méfaits du capitalisme et de la politique de la bourgeoisie, sous ses multiples visages .

Ces 53 % d’abstention signifient clairement une défiance et un désamour des Français, non pas de "la politique" ( ce serait si facile et ça en arrangerait tellement, à commencer au PS), mais plutôt, de la "classe" politique, perçue de plus en plus comme une "caste".

Ainsi, démonstration est faite, une nouvelle fois, que le "clivage droite /gauche" est dépassé et obsolète, et qu’il ne peut plus rendre compte des aspirations populaires.

On serait bien en peine de dire qui "de droite" ou "de gauche" n’est pas allé "veau-ter".

Et pour cause !

En revanche, mathématiquement, on peut déduire qu’une énorme majorité de "petits", des pauvres, des exclus, des peu argentés, des prolétaires, salariés des bureaux, ouvriers, chômeurs, petits artisans, petits paysans... n’est pas allée aux urnes.

Cela c’est extrêmement significatif que cette mascarade de "la gauche" doit cesser.

Si "la gauche" ne rassemble plus, ne mobilise plus en tant que pseudo-unité fondée sur rien, la place est à nouveau ouverte aux idées et aux hommes et femmes qui disent clairement ce qu’elles sont et veulent être : communisme, socialisme.

Les faux-semblants, cela suffit ! Cela aussi c’est un message, que l’on peut déduire de la confirmation de scores corrects (quoi qu’en nette baisse également) pour "Europe Ecologie" supposée représenter clairement "l’écologisme".

- Ne boudons pas notre plaisir, avec si peu d’électeurs, l’UMP, quoiqu’en tête des scores à l’issue du premier tour au niveau national en pourcentages de voix exprimées, mais derrière le PS en termes de sièges déjà attribués, prend le début d’une double claque, qui prolonge celle déjà reçue aux européennes, ce qui est réjouissant à certains égards mais pas suffisant.

Le score du FN, en progression par rapport aux européennes, est inquiétant et, évidemment, à analyser.

Cependant, rapportée au nombre d’électeurs et aux chiffres des régionales plus anciennes, cette progression n’est pas si importante que cela, il ne faut pas non plus tomber dans le piège des Le Pen père et fille, Gollnisch... qui se pavanent. Ce peut être aussi le chant du cygne noir.

Toutefois, pour le moment, ce parti, qui réalise 11,42% au niveau national (sce Int.) est en position de se maintenir dans plusieurs régions, c’est un fait.

Mais on peut aussi se demander si une partie de l’électorat UMP ou "de droite" ne s’est pas reportée sur ces listes pour signifier un désaccord de la politique menée par le pantin politique actuel du capitalisme, Sarkozy, comme en 2002.

Que donneront ces éventuels votes de protestation au second tour? Quel sera le report exact de voix? Où va-t-on voir le FN montrer son vrai visage en s’alliant avec l’UMP? En Rhônes-Alpes, le candidat UMP fait déjà des appels au FN.

- Ce scrutin est également un signe que de nombreux électeurs politisés (et contrairement au tableau que l’on dresse en permanence des électeurs en France, je pense que nombreux sont ceux qui aiment encore la politique, la vraie, et ne demandent que de la voir renaître) ont conscience, plus ou moins nettement, que la région est un échelon anti-démocratique, européaniste, mauvais pour eux, auquel ils ne reconnaissent aucune légitimité et qui, contrairement à ce que clame le PS , ne peut en rien servir de "contre poids politique", au contraire.

Nous venons d’ailleurs d’en avoir la preuve en actes en 2 ans de crise avérée pendant laquelle pourtant, les régions étaient déjà "à gauche"...A part contribuer aux politiques de l’UMP au niveau local, au lieu d’entrer en résistance, à quoi ont-elles servi?

Les véritables échelons de la démocratie locale, ce sont encore et toujours le département, et la commune. Justement ceux que Sarkozy et consorts voudraient "tuer".

- Ce scrutin voit aussi le NPA se faire laminer (par lui-même, avant tout), éliminé presque, du paysage politique bourgeois auquel il a voulu se fondre à toutes forces, sans cependant s’en donner les moyens réalistes, et au mépris des convictions profondes des citoyens qui pouvaient se reconnaître en lui et espéraient le voir changer le paysage politique sur le fond.

La claque est encore plus violente qu’aux Européennes. Il y a la matière à se poser de sacrées questions pour ses militants et dirigeants.

La politique du "dedans /dehors", les palabres incohérents pour les alliances, les positions dogmatiques en totale contradiction avec les objectifs affichés et les moyens réels, tout ce qui fut perçu comme une forme de "trahison" par ceux qui auraient pu, assez naturellement, se reconnaître dans ce parti, se sont payés cash pour cette formation issue du trotskisme qui a fait le choix de renoncer publiquement au communisme pour choisir un "anticapitalisme" sans histoire et sans contenu révolutionnaire.

- Les résultats de LO montrent que ce parti, lui, toujours trotskiste, ne se porte guère mieux, même si traditionnellement, ce genre d’élections ne lui a jamais réussi,(ce que d’ailleurs il ne cherche pas à faire, se contentant d’utiliser là ponctuellement les moyens de communication qu’offre encore la démocratie bourgeoise).

- Pour les communistes, ce scrutin démontre, puisque besoin était, que le "Front de gauche" semble, en effet, mauvais pour le PCF.

Mais comment pourrait-il en être autrement, dans une telle période?

Le Front de gauche, initié aux Européennes suite à l’irruption sur la scène politique du "PdG" de Mélenchon-Dolez-Coquerel, et qui fait suite aux stratégies des CUALs, et de la " Gauche Populaire" de MG Buffet, composé de sa multitude de petites formations arrivistes et des anciens chevènementistes et transfuges du PS ou lambertistes en quête de "places", échoue à faire mieux et plus que le PCF seul aux dernières régionales, et est doublement en baisse par rapport aux européennes de 2009, en général et rapporté au niveau national.

Les communistes, militants, sympathisants, ne se reconnaissent plus dans "la gauche" dont ils ont bien compris, en 30 ans de pratique à tous les échelons, à quoi elle avait servi, et son inutilité générale face aux attaques du Capital.

Certes, la comparaison 2004/1010 PCF/ Front de gauche est délicate puisque dans 14 régions le PCF faisait liste commune avec le PS dès le premier tour en 2004 !

En 2010, le "Front de gauche" obtient aux régionales une moyenne nationale de 5.84% (chiffres Int.) des voix exprimées - il est difficile, sinon impossible de comparer avec les résultats de 2004.

En revanche, on peut le faire avec ceux de des européennes 2009, toutes proportions gardées.

Et le résultat au niveau national est sans appel : non seulement en moins d’un an, le "Front de gauche" ne progresse pas mais encore, il baisse, puisqu’aux européennes il dépasse les 6 % (6.47% chiffres FDG), ce uqi n’est plus le cas en 2010, et que l’abstention, déjà importante en 2009, est supérieure en 2010.

Un point intéressant, malgré tout , qui en dit long sur l’état d’esprit de nombreux militants du PCF et qui n’est pas à prendre à la légère, c’est qu’en 2010, le nombre de listes communes avec le PS dès le premier tour est très largement en baisse : cette liste commune n’existe plus que dans 5 régions à savoir Basse-Normandie, Bourgogne, Bretagne, Champagne-Ardenne et Lorraine.

En 2004, dans les régions où le PC se présente hors le PS, en tête, rassembleur sous ses couleurs (principalement Picardie et Npdc) les listes communistes atteignaient les 10 %.

En 2004, dans les régions où avaient déjà été choisi l’embryon de la tactique actuelle, les listes affichent des scores différents de ceux obtenus cette fois, plus faibles, il faut le reconnaître.

Ainsi en Ile de France, la liste de rassemblement "Front de gauche" emmenée par le PCF et MG Buffet fait 7.2% en 2004, quand, en 2010, la liste "Front de gauche " emmenée par P. Laurent et Eric Coquerel fait seulement 6.55 % (source Int.) et connaît donc une baisse manifeste. Mais elle est certes en très légère augmentation si on veut comparer aux européennes où P. Le Hyaric avait obtenu 6.32 % des voix (sce FDG).

En Auvergne, où la liste de rassemblement emmenée par A. Chassaigne a fait 9.2 % en 2004, on est passé en 2010 à 14,24 %, ce qui fait d’A. Chassaigne, infatigable homme de terrain, populaire, présent, disponible, le vrai vainqueur de cette séquence électorale, et pourrait le désigner plus probablement comme candidat

pour succéder à Buffet que Pierre Laurent, s’il le voulait.

Dans le Npdc, la liste emmenée par A. Bocquet (non explicitement "Front de gauche" mais appelée "l’Humain d’abord - Liste d’union emmenée par le PCF" et clairement identifiée "communiste" sur le terrain) se maintient bien par rapport à 2004, avec plus de 10% (10.78% sce Int.), ce qui confirme le bon travail des camarades du PCF dans cette région pour se maintenir, mais rend aussi compte des problèmes de visibilité et d’identité, puisque, compte tenu de la crise et des attaques énormes que connaissent les électeurs dans cette terre historiquement rouge et ouvrière, on peut se demander si une liste et un programme encore plus clairement "communistes" n’auraient pas fait plus, la liste ne progressant que de 0.10 % en 6 ans .

Cela étant, il ne faut pas dénigrer les résultats comme ceux -ci, et au contraire, on peut les applaudir et les analyser.

En Limousin, la liste "Front de gauche" réellement étendue y compris au NPA, remporte plus de 13 % -ce qui constitue là encore une autre leçon, à savoir que les électeurs communistes et sympathisants accordent leurs suffrages volontiers aux listes d’union COMMUNISTES et ANTICAPITALISTES qui dépassent les clivages anciens.

La stratégie suicidaire de division et d’effacement d’une forme d’identité communiste visible en Picardie porte ses fruits amers, si l’on peut dire, et la division des communistes fait chuter la liste emmenée par M. Gremetz (dt la liste réalise quand même 11 % en Somme) qui ne dépasse pas les 6.2% contre plus de 10% en 2004 ; en outre la liste PS auyant emmené l’autre branche communiste de la région dès le premier tour fait moins bien en 2010 qu’en 2004 (on passe de 27.42 % en 2004 à 26.64 % en 2010) le tout sans empêcher un score à deux chiffres du FHaine, en position de se maintenir.

Qui dans cette région portera la vraie responsabilité du maintien du FN au second tour? Comptons, réfléchissons...

Une union des communistes derrière M. Gremetz aurait pu, sans doute, porter cette liste aux 10 % requis.

Quel gâchis !

En Corse, une liste certes intitulée "Front de gauche - Pour changer en Corse" mais avec une forte identité communiste et présentée dans les médias locaux - et nationaux - comme "liste emmenée par le PCF" connait une belle progression ; emmenée par D. Bucchini, cette liste dépasse les 10 % et est ainsi en position de se maintenir . Elle fait mieux que celle de Zucarelli et est cette fois en position de peser fortement sur la liste "DVG" de Giaccobi (qui est même largement battue à Bastia par la liste communiste qui réalise plus de 13 % avec "seulement" 40 % d’abstention, c’est à dire bien moins qu’au niveau national). En 2004 la liste emmenée par le même D. Bucchini faisait environ 6 %. Quelle progression !

En Rhônes-Alpes, le même "Front de gauche" fourre-tout atteint à peine les 6 %...Tandis que l’UMP et le FN ont le vent en poupe. Ce qui pourrait démontrer l’inanité, la dangerosité même, de la campagne "anti-burqa" menée par A. Gérin avec la droite.

En Aquitaine, la liste "Front de gauche" n’atteint même pas les 6 %, avec 5.95 % quand la liste PCF seule emmenée en 2004 par A.Guilhamet faisait 4.35 % (certes une progression, mais due manifestement à un transfert de voix du PS puisque la liste PS/Verts PRG en 2004 au premier tour faisait 38,42 % en 2004, donc, plus que les 37.63 % actuels).

Ces chiffres seront sans nul doute analysés et disséqués par les uns et les autres, à la lumière des campagnes qui ont été faites sur le terrain, de la composition des listes, de ce que l’on sait au niveau local qu’on ignore toujours au niveau national...

Mais, à moins d’être complètement autiste, il va falloir se rendre à l’évidence : la "stratégie" du "Front de gauche" effaçant le PC ne rassemble pas, n’est pas perçue comme ayant pu permettre une forte expression de la colère populaire, ne satisfait pas les communistes, et parmi eux, satisfait à peine les militants du PCF.

La direction actuelle du PCF a, à nouveau !, failli et a raté une opportunité historique de faire entendre une voix différente, des propositions communistes, elle a échoué à pouvoir se prétendre encore représentant du mouvement ouvrier, et des prolétaires.

Bien sûr, au QG du "Front de gauche", certains peuvent se raccrocher aux branches en se réjouissant d’avoir fait "plus que le MODEM et le NPA" - on a les victoires qu’on peut. Quand on va aller se jeter dans les bras du PS ou à peu près, effectivement, avec des scores médiocres la plupart du temps, on peut prendre les vessies pour des lanternes et continuer à cirer les godillots de JL Mélenchon pour 2012...

Si la satisfaction de la direction du PC en est à servir de plateforme à des règlements de compte entre trotskistes et ex-trotskistes, on est vraiment tombés bien bas ! On comprend que Mme Zappi et JL Mélenchon, eux, se réjouissent mais nous? !

Non, ça ne fait pas le compte dans une telle période, c’est même franchement lamentable de prétendre qu’un parti comme le PC avec son antériorité , ses forces militantes, son histoire, ses bases...aurait pu se sentir réellement menacé par le NPA (alors qu’il aurait pu profoiter du NPA pour augmenter une dynamique communiste, comme en Limousin) !

Alors que dire de ce premier tour pour NOUS, prolos, ET cocos? Nous toutes et tous qui, souvent en parfaite connaissance de cause, en pleine conscience, ne nous sommes pas déplacés aux urnes, et n’avons voté ni NPA ni Front de Gauche ni LO?

Cette élection est d’ores et déjà illégitime.

Que la colère, sous des formes diverses, monte, cela, c’est évident aussi. Et comment pourrait-il en être autrement?

Faut-il s’en réjouir?

En l’absence d’un véritable parti ou mouvement communiste, c’est -à -dire encore disposé à s’en revendiquer ouvertement ,encore disposé à défendre sans complexe des positions de classe (à l’instar du KKE grec par exemple), à présenter ses militants communistes, à oser des propositions réellement audacieuses et novatrices, surtout en cette période de crise et de récession grave, non, je ne crois pas qu’il faille s’en réjouir.

Ne pas se réjouir est une chose, constater que, toutefois, cette situation dit des choses intéressantes en matière de perspectives de reconstruction d’un "mouvement" communiste uni et novateur en est une autre.

La lueur d’espoir de ces résultats (à condition que chacun prenne ses responsbailités et cesse de faire l’autruche au nom de la défense de la Sainte Chapelle de Fabien), portée par les quelques listes sortant du lot (Auvergne, Limousin, Corse, Nord Pas de Calais notamment), c’est que, sans aucun doute, le communisme et la lutte de classe, syndicale et POLITIQUE, ont de l’avenir dans ce pays, en ce moment plus que jamais.

- Je ne parle pas du PCF, notons bien. Je parle de ce que peuvent être capable d’incarner localement certains camarades des rangs du PCF. Nuance.-

A condition qu’une formation politique qui ne s’en cache pas daigne en représenter les idées et propositions communistes, sans les trahir, sans se vendre au PS pour un plat de lentilles. Sans donner l’illusion que les élections bourgeoises seraient tout et règleraient tout. En s’en servant comme nous savions le faire fut un temps, sans se tromper d’objectif.

En reprenant, aussi, le chemin abandonné pour de mauvaises raisons en 1976, quand on a jeté aux orties la "dictature du prolétariat" contre rien, avec des pudeurs de pucelle, au lieu de faire monter dans le Parti le niveau d’exigence d’analyse et de propositions, mais aussi d’actions, vers une "démocratie prolétarienne" et les luttes de classe.

Ma conclusion est invariable : avec ou sans ce qui reste de communistes au PCF, il va bien falloir, rapidement, que TOUS LES COMMUNISTES de ce pays qui n’ont pas renié leurs idéaux, ni leurs combats, qui en "veulent" encore, s’unissent, un jour prochain, malgré leurs différences, malgré NOS différences, nos divergences, dont certaines sont évidentes, dans une formation qui permette de rassembler nos forces militantes actuellement dispersées et divisées.

Non pas pour contester au PCF ou à ce qui en tiendra lieu ou le remplacera, des "places" dans la course aux voix dans les élections bourgeoises, mais pour faire ce que ce parti ne fait plus depuis au moins 20 ans, c’est à dire organiser les forces, unir, avancer dans la contestation du capitalisme, dans le soutien des luttes de terrain qui tentent, chaque jour, d’arracher au patronat des bribes de droits, et pour construire enfin le projet politique qui nous manque.

Hauts les cœurs, camarades, comme toujours, le combat continue !

Demain sera "un autre jour". Il ne tient qu’à nous de savoir de quoi il sera fait.

lundi 8 juin 2009

FRONT DE GAUCHE/ NPA: ZERO PARTOUT... BALLE AU CENTRE?




Ces élections européennes,pour le NPA/Front de Gauche, c'est un peu Nadal et Federer à Roland Garros cette année. Nadal n'est pas allé en finale. Federer a ENFIN gagné, mais pas contre Nadal.

Du point de vue des communistes, plusieurs choses ressortent de ce scrutin du 7 juin 2009.

1 ° L' Union Européenne, en tout cas, son soi disant "parlement", est vécue et perçue comme une arnaque capitaliste, en tout cas, disons au moins, une construction profondément anti-sociale, non démocratique, tout juste bonne à s'occuper d'écologie (et encore faut-il entendre ce que l'on appelle "écologie" dans le contexte actuel).

2° Une bonne part des abstentionnistes est, à l'évidence, constituée de citoyens qui refusent cette construction-là, qui méprisent la classe politique actuelle dans son ensemble, classe politique qui se tutoie sur les plateaux de télé alors qu'elle est supposée être composée de gens qui défendent des projets de société différents, voire, opposés. Classe politique qui a un point commun, à de très rares exceptions, vouloir imposer par les faits ce que certains disent même rejeter en paroles, se mettre, en tout cas, d'accord, pour continuer à cautionner la fausse démocratie bourgeoise et pour empêcher toute alternative d'une véritable perspective révolutionnaire et d'une démocratie prolétarienne.

Oui, l'abstention est à la fois le signe d'un profond mépris et d'un refus obstiné. Certes, l'abstention en général n'est pas "plus de droite que de gauche" par essence, mais elle l'est plus ou moins en fonction des enjeux et des scrutins. Et l'Union Européenne, normalement, et si ma mémoire ne me joue pas des tours, ça fait voter , depuis toujours, les gens de droite qui ont compris, eux, depuis belle lurette, ce qu'était l"euro-impérialisme et quels avantages ils avaient à la bichonner.

3° Les communistes qui se travestissent prennent immanquablement des gifles. Le Front de Gauche, s'il a officiellement vu la victoire de 4 de ses candidats, dont Mélenchon (qui devient ainsi momentanément un bon "cumulard), est EN RÉALITÉ un échec pour le PCF, par rapport à 2004, car si on fait correctement les comptes, le PCF "soi-même" ne gagne rien mais fait la courte échelle à une transfuge du PS "militante féministe" - qui me semble plutôt "mélenchoniste" que communiste.

4° Les forces anticapitalistes qui ne savent pas être unitaires et ouvertes aux autres le paient aussi assez chèrement. C'est sans doute une des raisons du score mitigé du NPA, qui est resté très tourné vers lui-même pendant la campagne et n'a présenté quasiment que des militants NPA sur une ligne "100 % NPA".

NPA comme Front de Gauche ont affiché tous deux, chacun à leur manière, une volonté hégémonique, ou disons, une conception de la politique toujours "verticale", pensée en termes de "leadership", qui n'est plus en phase avec l'air du temps, puisque le temps semble venir enfin de la sortie de l'enfance politique réclamant une tutelle, la délégation de pouvoir, et un "homme providentiel".

5° Les restes de la vieille sociale-démocratie sont en train de disparaître définitivement. Le PS a pris la veste méritée après s'être essuyé les pieds sur le dos de notre vote "NON" de 2005, lorsque par abstention, il a collaboré avec l'UMP le 4 février 2008 pour faire passer le Traité de Lisbonne. C'est le moment de faire le ménage. Nous avons fait le ménage. Nous le ferons encore.

En d'autres termes, le score, tous partis confondus, de ce qui se revendique (à tort ou à raison) de "la gauche de gauche", compte tenu de l'abstention, est à peine satisfaisant.

Et c'est la conjonction de plusieurs "maladies", dont chaque partie, chaque "Nomenklatura" a sa part. Il n'y a pas plus de victoire du Front de gauche que de victoire (ou de défaite) du NPA. A peine le Front de Gauche est-il un peu moins démuni que le NPA puisqu'il emporte donc "4 élus" - mais si on doit se contenter de cela pour crier "hourra" on est mal barrés....

Il me semble que l'électorat communiste ( qui existe encore, on en a la preuve ici et ailleurs tous les jours) a simplement renvoyé dos à dos, ENCORE UNE FOIS, tous les succédanés de communisme qu'on lui présente sans discontinuer depuis des années: "collectifs unitaires anti-libéraux", "gauche populaire et anti-libérale", "front de gauche", "anti-capitalisme"...et a critiqué, encore une fois, l'absence de possibilité unitaire réellement radicale.

Cela témoigne en revanche d'une (très) bonne santé mentale de l'électorat communiste ou sympathisant communiste, socialiste révolutionnaire, qui, lui, et contrairement à ses soi disant "leaders médiatiques", n'a pas perdu complètement sa boussole ni certaines de ses valeurs fondamentales.

Mais partant du juste principe que "la pourriture est le laboratoire de la vie", à condition que toutes et tous nous nous retroussions les manches pour remonter la maison communiste sur des fondations solides, avec ou sans le PCF, avec ou sans le NPA, (avec tout le monde, ce serait mieux) tout n'est pas perdu et loin s'en faut.

Il faut être optimiste. Ne serait-ce que parce que, en ce 7 juin 2009, malgré tout ce que les médias menteurs nous diront, l'UMP et Sarkozy ont pris leur vraie première claque depuis mai 2007.

Nous avons, je pense, des raisons de l'être, optimistes.

Moi je le suis en tout cas. Pas par la méthode Coué, ni parce que j'ai abusé de ma moquette, mais parce que l'analyse des résultats "électoraux" doit nous incliner à être optimistes, SI, si nous savons à nouveau penser sur le long terme, de façon à la fois pragmatique, visionnaire, et radicale, si nous savons reprendre le contrepied exact de la pensée dominante, dans l'objectif unique de construire un projet politique révolutionnaire anti-capitaliste ( et ça, ça s'appelle donc un projet communiste, désolée...)

Nous, communistes, où que nous soyons, sommes une force. Une force éparpillée, une force en convalescence (ces 20 dernières années ont été tellement dures pour nous toutes et tous, depuis la chute du mur de Berlin, en gros), une force renaissante, mais une force réelle quand même.

Nous sommes confrontés à un éveil des consciences politiques chez nos semblables, dans notre classe, que nous devons absolument saisir.

Non pas pour nous rendre plus "sexy" en nous camouflant, non pas en essayant de coller à ce que les médias bourgeois nous tendent comme miroir aux alouettes. Non pas en allant faire des danses du ventre pour "remplacer" le PS.

Le Front de Gauche seul ne sera rien, pour des raisons de fond, tenant strictement à ce qu'il propose comme "vision du monde" (une énième resucée de la vieille social-démocratie, sans aucune perspective révolutionnaire).

Le NPA seul ne sera rien non plus, pour des raisons de stratégie, tenant principalement à ses relations avec le mouvement en général et les communistes dans le mouvement en particulier (une sorte de "grande LCR" donc).

C'est comme cela, je pense, qu'on peut analyser le résultat Front de Gauche/NPA : pour des raisons différentes, les électeurs "de gauche de gauche" ont renvoyé les deux formations plus ou moins dos à dos.

L'équation ne sera pas résolue en faisant simplement l'addition, factice, "Front de gauche + NPA". Certainement pas.

Pour être tout à fait complets, il est évident aussi que la galaxie communiste "activiste", principalement issue de l'éclatement progressif du PCF, est éparpillée sur toute la France, de façon très groupusculaire, sans parvenir à dépasser cela, ni à se fédérer, sans qu'aucune formation ne puisse prétendre à elle seule , remporter "le leadership", et c'est TANT MIEUX.

On ne sortira de ce cercle vicieux qu'en s'y collant toutes et tous, en reconstruisant un mouvement COMMUNISTE, où la liberté et le respect de l'autre seront la règle fondamentale, et dont l'objectif sera la mise au point, dans un travail collectif (et tant pis si nous sommes une addition de 150 "groupuscules"), d'un projet politique révolutionnaire susceptible de donner force et courage à tous les lutteurs en France, qui se battent contre le capitalisme.

On s'en sortira si on arrête de penser d'abord et exclusivement "parti" ou "formation", et qu'on recommence, majoritairement, enfin, à penser d'abord et avant tout "classe". PROLÉTARIAT. Alliés objectifs du prolétariat.

On ne s'en sortira, on n'avancera, nous, prolétaires, - dont les communistes doivent être, en effet, un "fer de lance" - , qu'en faisant, pour certains, acte d'humilité (au moins les pendules sont définitivement remises à l'heure ou presque, à part quelques obstinés, plus aucune formation communiste ou se réclamant du socialisme ne peut se prétendre plus "fine" ou plus "maligne" que les autres), pour d'autres, en abandonnant certaines vieilles lunes ("faire renaître le PCF" par exemple, ou "reconstruire le PS" ou "l'union de la gauche"), en acceptant ENFIN que le communisme n'est pas monolithique, qu'il n'est pas d'un bloc, que de ce point de vue il faut faire l'effort de sortir d'un point de vue théorique, du mauvais héritage de la IIIème Internationale.

Que, au contraire, le communisme connaît de nombreux courants, mais sur des bases communes intangibles (validité de l'analyse marxiste, combat contre le capitalisme, la bourgeoisie, leurs instruments de toute nature, perspective révolutionnaire n'excluant pas certaines réformes d'envergure, primat de la politique sur "l'économisme"...) et que, néanmoins, en toute logique, si nous ne sommes pas devenus toutes et tous complètement siphonnés, ce qui nous rassemble est bien plus fort que ce qui nous divise.

Pour conclure donc, commençons par rassembler tous les communistes et sympathisants communistes en France, dans un projet enthousiasmant, celui de la construction d'une perspective politique révolutionnaire.

Je ne me joindrai plus à un mouvement qui prétendrait "reconstruire le PCF", même si je comprends les camarades qui en font encore leur cheval de bataille. En revanche, et comme tant d'autres, je participerai avec grand plaisir à des débats qui auront pour but cette refondation nécessaire, cette construction, non pas d'un "sujet politique" mais d'un PROJET POLITIQUE pour le communisme au 21ème siècle.

DU PASSE, FAISONS TABLE RASE!

mercredi 18 mars 2009

Philippe Marlière - "Pourquoi je quitte le Parti socialiste"



"J’ai adhéré au PS en 1989 et je le quitte aujourd’hui pour rejoindre le NPA.

De cette expérience militante, je retiens que des obstacles politiques et institutionnels majeurs empêchent toute réorientation à gauche du PS. Le militantisme inlassable de camarades sincères ou la bonne volonté de quelques dirigeants n’y changeront rien. Avec le NPA, j’espère contribuer à la construction d’un parti en rupture avec les politiques d’accompagnement social du capitalisme, que propose le PS depuis plus de vingt ans. Voici, succinctement, quelques réflexions sur ma trajectoire au sein du PS et les enseignements généraux que j’en tire.

Le combat pour l’ancrage à gauche du PS

Je rejoins le PS au moment même où le mur de Berlin vient de tomber ce qui, au commencement du second septennat mitterrandiste, n’est pas chose aisée. Les militants sont déboussolés par l’ouverture à des ministres de droite pratiquée par le gouvernement Rocard. Si le stalinisme a perdu la partie, la social-démocratie est à peine mieux lotie. Les politiques néolibérales d’inspiration étatsunienne (reaganomics) et britannique (la « contre-révolution » thatchérienne) déferlent sur un continent européen largement dominé par des gouvernements conservateurs. Quand les partis socialistes sont au pouvoir (en France, en Espagne, en Grèce), ils prêtent leur concours à la consolidation de cet environnement néolibéral : au niveau national (politiques monétaristes et privatisations) et au niveau européen (soutien inconditionnel à la construction d’une Europe des marchés dérégulés avec l’Acte unique européen, puis le traité de Maastricht). Il n’existe alors en Europe aucun gouvernement social-démocrate qui mène des politiques au bénéfice des peuples.

Je me dirige vers la Gauche socialiste, un petit courant de gauche animé par Jean-Luc Mélenchon et Julien Dray. En 1995, la GS est rejointe par le groupe Démocratie et socialisme de Gérard Filoche, issu de la LCR. La GS recueille environ 1% des voix au congrès de Rennes et en obtiendra 13,5% au congrès de Grenoble en 2000. Ce score est resté en deçà de ceux enregistrés par le CERES dans les années 70 et 80. Cette progression se fait sur une double ligne de rupture. Externe : contre le néolibéralisme pratiqué par les gouvernements de droite et de gauche ; interne : contre des dirigeants socialistes de plus en plus acquis au prêt-à-penser néolibéral. Contre la tentation centriste du parti, la GS milite pour une alliance « Rouge, Rose, Verte », dès 1992. Celle-ci est combattue par les autres courants du parti, mais l’idée s’impose progressivement dans les esprits des militants puis, dans la pratique, avec le gouvernement de la Gauche plurielle. La GS est le seul courant qui fournit un encadrement politique à ses membres, qui débat, qui étudie l’histoire du mouvement ouvrier, qui élabore une critique du capitalisme financier et qui porte un intérêt aux questions internationales. Je participe à quelques rencontres de la République sociale européenne, animée par Harlem Désir et Marie-Noëlle Lienemann. Nous côtoyons des représentants d’ailes gauches sociales-démocrates. Nous prêchons dans le désert car nous sommes alors en plein blairisme triomphant (1999-2001). Je remarque à cette occasion que la ligne de partage sur la question de la mondialisation néolibérale ne sépare plus la droite et la gauche, mais traverse les partis sociaux-démocrates. Partout en Europe, les blairistes sont les serviteurs zélés du capitalisme. Fait unique dans ce parti d’hommes d’âge mûr, la GS accueille de nombreux jeunes à travers des syndicats étudiants et lycéens, ainsi qu’SOS-Racisme.

Il y a certes des ratés importants. Les mitterrandistes Mélenchon et Dray votent en faveur du traité de Maastricht. Ce traité forme l’ossature qui permet d’accélérer le basculement vers l’Europe de la « concurrence non faussée », et dégage la voie aux traités ultérieurs qui resserrent encore plus le carcan néolibéral : Amsterdam, le traité constitutionnel et Lisbonne.

Les militants de la GS ambitionnent de construire une aile gauche qui, progressivement, deviendrait une pièce majeure dans le jeu interne. Par le biais du débat démocratique, nous espérons rallier à nos thèses des militants « de gauche » qui ont une conception du socialisme « moins exigeante » que la nôtre. Objectif : la construction d’un bloc majoritaire qui permettrait d’ancrer à gauche le PS, prélude à une réunification des gauches françaises sur une ligne de rupture avec le social-libéralisme. Vingt ans après, je considère que cette stratégie n’a pas fonctionné. Depuis la disparition de la GS en 2002 et les revers qui ont suivi le référendum de 2005, le repositionnement à gauche du PS est même devenu un objectif hors d’atteinte.

Défaites et reniements

Jusque 2002, la GS monte en puissance dans le PS, même si elle ne parvient pas à inverser la tendance de plus en plus social-libéralisante du gouvernement Jospin. Jean-Luc Mélenchon et Marie-Noëlle Lienemann entrent au gouvernement, en négociant une marge d’autonomie relative pour leurs ministères (enseignement professionnel et logement). Mais la gauche du parti subit de plein fouet le contrecoup de la défaite présidentielle de Lionel Jospin. Les ambitions personnelles et les querelles d’ego, longtemps contenues, éclatent au grand jour. Des individus (ici, Mélenchon et Dray) détruisent en une soirée des années de labeur militant et provoquent la scission de la GS. Quatorze années d’un patient travail de construction d’une aile gauche sont réduites en miettes. Commence alors le déclin de la gauche du PS, avec la valse des courants et des étiquettes : Nouveau Monde (Mélenchon-Emmanuelli), le NPS de Montebourg-Peillon-Dray, le NPS sans Dray parti rejoindre les sociaux-libéraux, Forces Militantes (Dolez), Trait d’union (Mélenchon après son rapprochement avec Fabius), Alternative Socialiste (Emmanuelli), NPS avec l’arrivée d’Emmanuelli avec, puis sans Peillon, Reconquêtes (Emmanuelli, Hamon) et aujourd’hui Un Monde d’Avance. Seuls Démocratie et socialisme (Filoche) et Pour la république sociale (Mélenchon) constituent de vrais courants. Outre leur stabilité, ils restent fidèles à l’ambition de la GS de socialiser les militants sur une ligne de gauche. Leur influence dans le parti est malheureusement assez marginale.

A partir de 2002, la durée de vie des courants de « gauche » est éphémère (pour certains, elle est inférieure au temps qui sépare deux congrès). Ces structures se construisent et se déconstruisent autour des pratiques césaristes de barons nationaux. La dimension éducative au cœur du militantisme a disparu. Les militants apprennent la naissance et la disparition de leur courant dans la presse nationale. Il n’est pas rare que des dirigeants opportunistes et marqués à droite rejoignent l’une des factions de « gauche » avant de repartir au congrès suivant vers un courant qui servira mieux leur carrière (Montebourg, Peillon). D’ex-cadres de la GS se recentrent (Désir rejoint Jospin, puis Strauss-Kahn) ou passent dans l’aile droite du parti (Dray, Boutih).

Quoiqu’en ordre dispersé, les courants de gauche du PS mènent une campagne remarquable pour le Non au traité constitutionnel. Politisant le débat sur l’intégration européenne, elles attirent à elles des milliers de militants exaspérés par le contenu d’un traité qu’ils ont pour la plupart attentivement lu. La victoire du Non retombe comme un soufflé à l’occasion du congrès du Mans, en novembre 2005. Les dirigeants de la gauche du PS (à l’exception de Filoche et Dolez), déjà en embuscade pour la présidentielle, se rallient à la synthèse de François Hollande. Les militants présents protestent vivement, mais ainsi va la démocratie socialiste. Après avoir piétiné la résolution du Conseil national de 2004 (qui spécifiait que la Constitution européenne était en l’état inacceptable), puis manipulé les chiffres du vote interne sur le traité constitutionnel (le Non l’emportait), Hollande et la droite du parti parviennent à dérober aux militants la victoire du Non de mai 2005. Ils étouffent dans l’œuf toute critique de gauche en regroupant l’ensemble du parti autour d’une synthèse molle. Le déclin de la gauche socialiste s’accélère ensuite. Sans figure nationale de premier plan pour les porter dans le jeu médiatique, les idées de gauche ne sont que très rarement prises en compte. Puisque les sondages la présentent comme la candidate la mieux à même de battre Sarkozy, les militants investissent logiquement Ségolène Royal. La gauche socialiste en est réduite à soutenir Fabius, l’ex-ennemi libéral, dont le gouvernement rédigea la loi de déréglementation financière dans les années 80. Royal ne tient pas compte du programme socialiste, au demeurant peu à gauche, et mène une campagne droitière axée sur les questions d’ordre public. Elle déserte le terrain social que vient occuper Sarkozy. Le PS perd une élection qu’elle abordait dans une position de force et la direction hollandaise n’est même pas critiquée. En 2008, une majorité du groupe parlementaire socialiste se fait complice du coup de force sarkozyste en refusant de voter contre la ratification parlementaire du traité de Lisbonne voulue par le président. Ce traité est pourtant largement identique au traité constitutionnel rejeté par 55% des Français deux ans plus tôt. Le travail de politisation sur l’Europe de 2005 semble réduit à néant.

Au congrès de Reims, fin 2008, l’union historique des gauches socialistes réunies autour de Benoît Hamon ne recueille même pas 20% des voix. Ségolène Royal frôle de peu la victoire dans le vote plébiscitaire pour le poste de premier secrétaire. La gauche du PS fait son entrée dans une direction idéologiquement hétéroclite. Le coup de barre à gauche promis par Martine Aubry fait long feu : dans la foulée de son élection, elle déclare que le PS fera campagne aux élections européennes sous la bannière du Manifesto rédigé par le Parti des socialistes européens. Dans cette plate-forme électorale, le PSE réaffirme son soutien au traité de Lisbonne. Fin février 2009, les royalistes rejoignent la direction du parti, ce qui marginalise encore plus la gauche socialiste. Le tropisme droitier des directions socialistes réapparaît : en janvier 2009, lors des massacres de l’armée israélienne à Gaza, la direction socialiste se borne à établir une responsabilité symétrique entre l’agresseur israélien et les victimes palestiniennes. Elle passe totalement sous silence la question de l’occupation des terres palestiniennes depuis 1967. En février 2009, alors que la colère sociale monte en France et en Guadeloupe, le PS temporise et disparaît des cortèges de manifestants. Avec Aubry, les carriéristes et les opportunistes de droite continuent de régner en maître. La gauche assiste impuissante à la composition et décomposition de ces majorités interchangeables.

Étrange démocratie socialiste

Personne au sein de la gauche socialiste ne conteste que le parti est essentiellement dirigé par des carriéristes. Difficile de défendre la trajectoire de Dominique Strauss-Kahn, directeur du FMI ou de Pascal Lamy, directeur de l’OMC. Difficile aussi de se reconnaître dans le parcours peu rectiligne des Peillon, Royal, Lang, Montebourg, Valls, Hollande, Dray, etc. Certains camarades arguent cependant qu’il est injuste de considérer que les dirigeants représentent l’ensemble du PS ; qu’ils renvoient une image fidèle de ce que pensent et souhaitent les militants de base. Il existe certes dans le PS – dans tous les courants du parti – des militants honnêtement de gauche. Il serait également erroné de mettre sur un pied d’égalité Benoît Hamon et Vincent Peillon, ou Henri Emmanuelli et François Hollande. Il faut toutefois considérer qu’à l’exception du vote interne sur le traité constitutionnel, fin 2004, les militants ont porté à la tête du parti des majorités droitières. François Hollande, un personnage opportuniste et cynique, dirigea le parti pendant onze années et Ségolène Royal fut investie candidate à l’élection présidentielle. Malgré ses slogans empruntés à un manuel de morale de la 3e République et son score médiocre en 2007, Royal reste populaire dans le parti. De ce point de vue-là, il faut bien reconnaître que les dirigeants sociaux-libéraux au sommet de l’appareil socialiste sont, dans une certaine mesure, le reflet de ce que pense et souhaite une part non négligeable de la base militante.

Certains estiment que les militants socialistes sont authentiquement de gauche. Cependant, leur adhésion au PS ne s’est pas faite sur la base d’une connaissance des programmes et des idées des dirigeants, mais sur le sentiment d’appartenance à la grande famille de la gauche, en fonction d’une orientation et d’une adhésion à des principes généraux. Soit. Le phénomène de dépossession des voix militantes par le personnel professionnel de la politique est bien connu depuis que Roberto Michels a énoncé la loi d’airain de l’oligarchie des partis. Cependant, il est caricatural d’opposer une élite de droite à une gauche militante. Force est de constater qu’il existe un nombre relativement important de militants qui pense que le PS doit cesser de se battre pour les travailleurs, de promouvoir des politiques de redistribution radicales, de pratiquer l’union de la gauche, qu’ils souhaitent remplacer par une alliance avec le Modem. Dans les courants Royal et Strauss-Kahn, on trouve nombre de militants qui défendent de telles orientions.

Mais il y a plus grave encore : le jeu de la démocratie partisane est aujourd’hui totalement perverti. Les militants peuvent certes se battre pour imposer une orientation politique et programmatique par le biais de motions. Cependant, les dirigeants n’en tiennent pas compte la plupart du temps. Ce fut le cas lors de la ratification parlementaire du traité de Lisbonne, assurée grâce au soutien des socialistes. Le PS s’était pourtant engagé à faire voter le peuple dans un nouveau référendum. Le parti tolère que le candidat à l’élection présidentielle s’affranchisse du programme arrêté par les militants. De manière générale, les débats sur les motions lors des congrès sont menés au pas de charge, les synthèses de textes sont réalisées de manière opaque et les alliances de congrès sont le fait du Prince, c’est-à-dire que le leader de motion décide, en son âme et conscience, avec qui il va négocier les voix militantes qui se sont portées sur son nom et sur son texte.

On peut se réjouir de la tenue au PS de débats contradictoires, du vote sur des motions proposant des orientations distinctes (de la gauche radicale au blairisme). Toutefois, à quoi bon une telle débauche d’énergie militante si, à la fin, chaque congrès reconduit la même ligne sociale-libérale ? A quoi sert ce pluralisme davantage théorique que réel, si le jeu prétendument démocratique des courants est avant tout utile au carriérisme des dirigeants ?

Une position dominante, mais non hégémonique

Les fonctions politiques du PS sont essentiellement droitières : la présidentialisation du parti dépolitise les débats et favorise l’émergence de dirigeants carriéristes et populistes ; la plupart de ces dirigeants sont acquis aux idées du néolibéralisme et la personnalisation des débats a sapé le respect dû aux textes démocratiquement adoptés par la majorité des militants.

On peut arguer que la nature sociale du PS reste essentiellement de gauche. Cette nature sociale renvoie à l’image de parti de gauche que possède toujours ce parti dans la population, quelles que soient les critiques que les individus puissent lui adresser. Si le peuple considère que le PS n’est pas vraiment un parti qui défend des idées socialistes, il peut néanmoins estimer que, potentiellement, il demeure ce parti-là ou pourra le redevenir un jour. Ce raisonnement explique pourquoi nombre d’électeurs qui avaient voté pour Olivier Besancenot et Arlette Laguiller en 2002, ont voté pour Ségolène Royal en 2007, en dépit de ses idées et ses propositions qui n’avaient rien de socialiste. Il s’est agi d’un réflexe d’auto-défense contre un candidat de droite jugé encore plus nocif que les bavardages réactionnaires de Royal. Le vote PS constituait le moyen le plus concret de résister à la droite la plus revancharde depuis Vichy.

L’identification d’une majorité de l’électorat à la nature socialement de gauche du PS (fût-elle virtuelle) explique que le PS soit resté depuis les années 80 le parti dominant à gauche. Cette position est dominante, mais non hégémonique, car les électeurs connaissent bien les turpitudes de ses dirigeants. Ils se souviennent des promesses non tenues et des politiques néolibérales qui ont été menées au gouvernement. Ils se gaussent de ces bourgeois beaux parleurs, ces mollétistes culturels qui ont le verbe gauchiste sur les tribunes de congrès et qui reprennent ensuite leur discours « raisonnable » de gestionnaire dès que les votes ont été engrangés. Ils exècrent la plupart de ces dirigeants et pourtant ils continuent dans leur grande majorité de voter pour le PS, quand ils ne s’abstiennent pas.

Pourquoi ? Parce que le peuple de gauche attend des partis politiques qui le représentent des débouchés politiques immédiats pour soulager la précarité de sa situation sociale et politique.

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La perception selon laquelle le PS est le mieux placé – ou, si l’on préfère le moins mal placé – pour améliorer le quotidien des travailleurs est bien ancrée dans les esprits. Pour cette raison, il est peu probable que le PS s’effondrera électoralement dans un proche avenir. Il n’est cependant pas à exclure que, sur le long terme, il connaisse le même destin que la SFIO à la fin des années 60. Sur le moyen terme, le NPA est le mieux placé à gauche pour recueillir les voix des électeurs qui votent socialiste faute de mieux. Le nouveau parti rassemble diverses traditions de gauche, il est résolu dans son combat contre le système capitaliste et pour une société solidaire et réellement démocratique. Il est aujourd’hui rejoint par des jeunes, des femmes et des individus des classes populaires, un phénomène unique à gauche aujourd’hui.

Le NPA est le parti dont les idées et la stratégie peuvent offrir une perspective aux militants et aux sympathisants du PS qui n’ont pas renoncé à leur aspiration à un monde plus juste et plus démocratique.

Lettre + Interview ICI sur le site "Contretemps".

Philippe Marlière est maître de conférences en science politique à University College London.