mardi 13 décembre 2011

Crise systémique, économisme, réformes et révolution.

Ce matin, je me faisais la réflexion que la révolution a bel et bien commencé. Le "hic", c’est que c’est la bourgeoisie qui est en train de la mener...Elle a l’avantage offensif.

Question : face à une offensive révolutionnaire de la bourgeoisie, quelle doit être la position juste pour le prolétariat et quelle doit être la position juste des communistes ?

A quoi cela sert-il de faire des propositions économiques (certes justes) si on ne met pas avant tout sur la table la question du Pouvoir politique, si on ne dénonce pas l’ensemble (culturel, social,économique et politique) du système capitaliste ? Il ne s’agirait pas de ressasser la proposition (à mon sens fausse telle qu’elle existe jusqu’alors) de "6ème république" en répétant qu’il faut introduire de la proportionnelle etc. Non.

Il faudrait déjà taper, et dur, sur la question de la démocratie représentative et des institutions qui en découlent, sur les fameux "appareils d’Etat", et sur la question de la citoyenneté, liée à la nation.

On l’a vu pourtant avec la question des retraites, mouvement sur lequel, finalement, on a peu écrit et peu réfléchi (or, le mouvement ouvrier doit apprendre autant, sinon plus , de ses échecs que de ses succès).

Qu’est ce qui a manqué AUSSI au mouvement pour qu’il ait une chance véritable d’emporter le morceau ?

Bien sûr il a manqué de mobilisation et de grèves directement sur les lieux de production.

Mais pourquoi cela a t il manqué ? Alors ok, mollesse de certaines institutions syndicales, situations matérielles précaires, tendues, propagande massive etc etc (mais enfin bon, de façon objective le mouvement ouvrier a connu des conditions bien pires qui ont pourtant été des situations de victoires d’étapes du prolétariat).

Ce qui a manqué je pense (mais je me trompe peut être), surtout c’est la dimension politique, qui aurait consisté à formuler, à faire apparaître la DOMINATION, en élevant le niveau des contradictions DANS le bloc au pouvoir, par des propositions politiques de haut niveau.

Ce qui a manqué c’est que "l’avant-garde" (enfin, ce qu’il en reste) fasse son boulot "d’éclaireur" (je dis bien "éclaireur" et pas "guide" et encore moins "maître") et refuse de continuer à jouer le rôle de "garde-chiourme" du mouvement ouvrier dans lequel, nécessairement, le bloc au pouvoir la cantonne. D’une certaine manière, c’est donc "nous"qui avons fait défaut à cette époque, probablement.

Il fallait contester, non seulement le bloc au pouvoir, mais encore le lieu même du pouvoir, sa forme, pour démontrer la surdité d’un bloc au pouvoir garant du et garanti par le système institutionnel actuel.

Ce qui a manqué, c’est une proposition politique relative aux appareils d’Etat.

Je pense que plus ou moins intuitivement, les prolétaires engagés dans ce mouvement des retraites l’ont perçu assez rapidement. Ils ont perçu que ce mouvement, sans proposition concrète de renversement de l’ordre établi, était vain. Et hélas, l’histoire immédiate a démontré que ceux qui le pensaient ou le pressentaient, avaient raison.

C’est la différence entre un "mai 68" (aussi critiquable et imparfait soit il) et "nous aujourd’hui", cette dimension politique et contestatrice du cœur du Pouvoir, c’est à dire, de la domination destinée à assurer notre exploitation, sous toutes ses formes.

Il va de soi que dans de telles conditions, la proposition d’un référendum apparaissait immédiatement comme d’une inanité folle, d’une incohérence , d’une absurdité insupportables !

A un mouvement, il faut un BUT et des REVENDICATIONS structurantes.

Un mouvement de contestation du bloc au pouvoir qui DEMANDE au lieu de PRENDRE ce que, forcément, ledit bloc va refuser de lui DONNER est déjà dans une position de faiblesse.

C’est ce que démontre aussi le contre- exemple (pour le moment) des "Indignés" en France (ailleurs, je ne sais pas trop, mais je crois que ça se politise et ça se radicalise pas mal dans un sens de lutte des classes). Un "mouvement" qui ne propose RIEN et n’affiche aucun BUT concret a à peu près autant de chances de réussir à se développer qu’un manchot a de chances de battre Roger Federer au tennis.

Par ailleurs et enfin, plus que jamais, il devient extrêmement important pour nous de rétablir la réalité que désignent certaines expressions, certains mots, il devient vraiment urgent d’être précis, et de ne pas jouer à "l’attrape-tout" pour des raisons électoralistes, ou par "peur" d’être "minoritaires".

Si on colporte des choses aussi non-structurantes (sinon carrément fausses)... que l’opposition "riches/pauvres", que le "partage des richesses", que la "crise financière", que "la dictature des marchés financiers", que "la responsabilité des agences de notation" ou la "perte du pouvoir d’achat" etc... on ne s’en sortira pas, car ces concepts ne sont pas là pour permettre de démasquer la REALITE DE LA DOMINATION et de l’EXPLOITATION.

Ils sont là au contraire pour contribuer à continuer de les masquer, paradoxalement.

Si on s’en tient au seul niveau de "l’anticapitalisme" (à mon sens une donnée certes critiquable mais qui peut être néanmoins politiquement utile par les temps qui courent), à supposer que l’on ait pour but de démontrer qu’il faut combattre le capitalisme, c’est ainsi, en laissant prospérer ces faux clivages, qu’on en arrive à penser que Cheminade est un anticapitaliste, que Mélenchon est un anticapitaliste, que Marine Le Pen est anticapitaliste (et pourquoi pas Sarkozy et Hollande, allons-y gaiment), bref que tous ces gens (que je n’assimile pas pour autant, je précise) qui directement ou indirectement, consciemment ou pas, "roulent" en réalité pour une fraction de la bourgeoisie (la bourgeoisie locale et industrialo-immobilière par exemple) contre une autre (la bourgeoisie compradore et financière), "rouleraient" en réalité pour "nous.

Bon, bien-sûr, si on a fait le choix de ne pas combattre le capitalisme pour le renverser, la question ne se pose pas dans les mêmes termes...mais cela ne nous concerne pas.

Si l’on s’en tient à ce niveau d’analyse et qu’on le laisse prospérer sans réagir à chaque fois pour remettre les choses à plat, et bien, bon gré, mal gré, on fait le jeu de la bourgeoisie.

Si l’on s’en tient aujourd’hui à l’économisme, là aussi on fait le jeu de la bourgeoisie, car on aboutit en réalité à ne faire que des propositions de replâtrage du capitalisme. Or, ce n’est pas à nous de trouver au Capitalisme des solutions de "sortie de crise" !

Les réformes, quand il y a un espace pour en faire de réelles, pourquoi pas. On ne peut pas être "contre par principe". Même si le réformisme implique nécessairement une partie de collaboration de classes qu’il faut assumer (et dont on connait les effets mortifères sur l’aiguillon de la lutte de classe). Mais il y a des solutions qui diffèrent dans leur justesse en fonction des époques...

Donc, là où le bât blesse vraiment, c’est quand on continue à suivre la voie réformiste quand le capitalisme a sonné depuis un moment la fin de la collaboration de classes.

Dans une telle période, les propositions "réformistes", pour avoir une chance de confluer avec des propositions révolutionnaires, doivent comporter de hauts niveaux d’exigence politique et des propositions franchement progressistes, pour avoir au moins la faculté d’ouvrir les esprits à un autre possible.

Proposer des réformes (surtout des réformes en papier) face à un adversaire de classe qui est, lui, entré dans un combat révolutionnaire (le K), c’est comme proposer à un crocodile de bouffer de l’herbe alors qu’il peut croquer du buffle ou de l’antilope, vous voyez...

Aussi, nous n’avons pas cinquante solutions, pour nous en sortir, nous n’avons même pas deux solutions.

Nous n’avons comme unique solution que 1/ de nous battre, sur le terrain des Idées et des propositions d’actions, pour faire apparaître la DOMINATION et l’EXPLOITATION de la bourgeoisie, et, (comme je ne connais finalement que peu de personnes qui, ayant pris conscience de la domination et de l’exploitation qu’elles subissent, voudraient consciemment continuer à la subir), 2/ d’aider à organiser et à se mettre en mouvement les masses prolétariennes largement entendues (ouvriers, employés, chômeurs, étudiants, petits paysans, artisans et "auto-entrepreneurs" prolétarisés...) pour renverser le système (culturel, social, politique, économique) qui permet cela.

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