jeudi 3 mai 2007

EST CE UNE VALSE OU UN TANGO?...

La réponse est : peu importe, cela se danse à deux et au final, quelqu’un se fait baiser.

La qualité du "débat" qui nous a été infligé hier soir était, politiquement, économiquement, idéologiquement, proche du niveau de la mer, c’est-à-dire à peu près 0.

Ce qui ne signifie pas qu’il n’était pas signifiant ce débat…(et comme on peut regretter l’absence, aujourd’hui, de Bourdieu, de Barthes…).

Le fait de vouloir s’opposer à l’accession au pouvoir de Nicolas Sarkozy ne doit pas empêcher un brin d’objectivité à l’égard de la candidate de Désirs d’Avenir, et vice-versa.

Au contraire : vouloir s’opposer à l’accession au pouvoir de Nicolas Sarkozy DURABLEMENT implique nécessairement une critique ferme et argumentée du positionnement idéologique de Ségolène Royal.

Et vice-versa également.

Il est acquis que la plupart des gens de gauche voteront Royal soit par conviction (et oui il y a une contradiction dans cette phrase mais nous y reviendrons et cela fera l’objet d’un autre débat), soit par obligation.

La plupart des gens de droite voteront Sarkozy, exactement pour les mêmes raisons.

Pour ceux et celles qui ne savent ni si ils sont de droite, ni si ils sont de gauche, et qui ont surtout oublié que la lutte des classes était toujours d’actualité, et bien ils feront comme d’habitude, et je le dis sans mépris mais avec une profonde tristesse (car cela signe aussi notre échec), ils voteront avec leurs pieds. Ils voteront Sarkozy après avoir voté Royal, ils voteront Royal après avoir voté Bayrou, et s’ils pouvaient re-voter Chirac après avoir voté Mamère ils le feraient…

Enfin, il y a ceux et celles qui n’iront pas voter du tout, estimant, à tort ou à raison, que cette élection n’est pas « la leur » ou pensant ainsi faire acte de salut public en ne cautionnant plus cette mascarade.

Je ne reviens donc pas sur la finalité immédiate de cette élection qui est construite comme un plébiscite à l’envers de Nicolas Sarkozy : « pour ou contre Nicolas Sarkozy ? ».

Ce qui, au fond, n’a pas grand intérêt puisque, (et en cela je rejoins complètement Roberto Ferrarrio) pour les vraies victimes, pour les fragiles, les précaires, les exclus, et même pour ceux qui sortent encore la tête de l’eau, d’une manière ou d’une autre, cela va aller mal, les vraies questions seront soigneusement non-posées (pour éviter que l’on trouve des solutions) et oui, il faut « entrer en résistance ». Mon choix est fait également.

Ce n’est pas cette élection en soi qui est un vrai problème : c’est ce qu’elle révèle de notre décrépitude morale.

Dans sa construction, dans son déroulement, dans ses conséquences, dans les symptômes qu’elle offre à voir que la démocratie française ( à l’instar d’autres pays d’ailleurs, nous n’avons pas le monopole), qui, contrairement à ce que l’on entend claironner partout depuis le 22 avril 2007, va très mal et ne risque pas d’aller mieux.

Je suis horrifiée par la teneur du débat en général. Il me donne des boutons, des allergies, des hauts-le-cœur. J’en perds presque le sommeil.

J’ai l’impression de naviguer à vue dans une dimension parallèle névrotique où le double discours, le double langage, le double-jeu, règnent en maître, comme aux pires heures de l’Occupation.

Chez les politiques, chez les médias, chez les citoyens…à de rares exceptions, ce n’est même plus que l’on n’entend que des conneries, c’est que l’on n’entend RIEN.

C’est trop tard pour aujourd’hui mes ami-e-s, ça y est : nous sommes « cadrés », la nasse est refermée. Nous sommes en quelque sorte, prisonniers, de la marche de l’Histoire.

C’est un constat - ça ne veut pas dire "baissez les bras".

Alors, sommes-nous tous et toutes devenus dingues pour ne pas être simplement révoltés par le VIOL moral et intellectuel que nous sommes actuellement en train de subir (et ce quoi que l’on décide de faire le 6 mai) ?

Nous devrions être dans la rue du matin au soir pour récuser et Sarkozy et Royal, en tant qu’ils sont gardiens et « pérénisateurs » manifestes d’un système qui cherche à nous faire crever !

Plus cette élection avance dans le temps, et plus je suis horrifiée.

J’ai l’impression d’être dans un film, à mi-chemin entre « Festen » et « Vol au dessus d’un nid de coucous ».

Un rapide bilan, que je pourrais tout à fait documenter (mais vous pouvez le faire aussi, n’ayez pas peur, les exemples en réalité sont légion et facile à trouver) mais je ne veux pas alourdir le propos :

Il y a non pas un « brouillage des valeurs » de la droite et de la gauche mais une « perversion des valeurs » de la droite et de la gauche.

Il y a non pas une « libération de la parole » mais un « verrouillage total de la parole ».

Il y a non pas une « poussée de la démocratie » mais une « poussée de la démagogie ».

Il y a non pas une « forte mobilisation des électeurs » mais « une manipulation accrue des masses ».

Il n’y a pas de « désir » ni « d’amour » mais il y a « volonté de puissance » et « orgueil ».

Il n’y a pas « don de sa personne à la chose publique » mais il y a « rapt de la chose publique au profit de sa personne ».

Il n’y a pas de « médias » mais il y a des « mendiants »…

Au risque de me faire trucider « wébétiquement », d’être de nouveau vilipendée comme « soutien actif de Sarkozy » (je rêve !…), au risque d’être incomprise, au risque de passer pour facho, réac, toutes ces gentillesses que l’on m’a déjà dites…je maintiens ici que Royal et Sarkozy sont les deux faces d’un même Janus, qui s’appelle libéralisme.

Je maintiens que ce sont les deux faces d’une même médaille qui est celle accrochée au revers de l’uniforme capitaliste.

L’un cache et l’autre fait semblant de montrer, et cela, chacun à tour de rôle.

L’essentiel est à chaque fois dans ce qu’ils ne veulent pas dire.

Je suis désolée ( je suis vraiment sincèrement désolée) de souligner que sur une question qui est, pour moi d’importance, à savoir celle du traitement des sans-papiers, l’affreux suant a eu une parole juste, qui résume presque tout : « Madame, ce que vous me reprochez dans l’affaire du grand-père chinois arrêté devant l’école, c’est de l’avoir arrêté devant l’école ».

Cela m’a fait vraiment HONTE que cette phrase ait trouvé une résonance particulière en moi dans tout ce galimatias. Cela m’a fait HORREUR de constater que c’est le plus évidemment mortifère pour nos libertés qui a mis le doigt sur le nœud du problème idéologique de la campagne : le programme de l’un ou celui de l’autre, c’est presque la même chose.

Du coup, l’assaut de Royal sur les enfants handicapés, très juste sur le fond, il ne s’agit pas de cela, perd de sa force, puisqu’au fond, elle n’est pas moins dissimulatrice et manipulatrice que lui sur d’autres sujets.

Ce n’est pas de "l’anti-Ségolénisme primaire" qui me fait dire cela. Je m’en fiche un peu de Ségolène ; c’est Royal en tant que porte-parole ou caution qui me débecte. (Sarkozy aussi mais je ne le précise pas, je ne suis pas de droite...)

Ce que j’ai vu hier soir, ce sont deux enfants, arrogants, privilégiés et mal élevés, qui jouent aux candidats en se drapant dans les habits de leurs parents.

Et ils se trouvent que leurs parents se nomment Libéralisme et Capitalisme.

Alors, mes ami-e-s, mes camarades, le 6 mai, vous voterez ( ou vous ne voterez pas) comme bon vous semble, comme vous le croyez juste, en fonction d’éléments « programmatiques », en fonction d’espoirs aussi, bref, quoi que vous fassiez, je sais que vous le ferez de bonne foi, avec un cœur de communiste.

Ne perdez pas trop votre énergie quand même...

J’avoue que moi je n’ai pas la force ni l’envie de rentrer en tant qu’actrice ou figurante dans ce film-là que je vois se dérouler nettement sous mes yeux (et plus l’issue en est proche plus je le vois nettement) . Le statut d’intermittent du spectacle est trop incertain peut être ;-)

Quoi qu’il advienne de ce 6 mai (qui aurait aussi bien pu tomber le 5 ou le 13), ne perdez pas de vue que, d’un point de vue presque philosophique, le vrai choix, le vrai combat il est ailleurs, autrement, et surtout, il n’est pas dans ce 6 mai.

Le drame aussi, c’est que ce combat, il n’est plus uniquement social, il n’est plus uniquement économique. Il n’est même presque plus uniquement politique. Il va être bien plus fondamental.

Il est, tout simplement, éthique.

Il faut défendre la Liberté. Et donc, plus que jamais, oui, "entrer en résistance".

Fraternellement

2 commentaires:

@Caius a dit…

Enfin un message... ;-)
Quel courage d'avoir écouté ce débat, j'avoue que je n'ai pas pu... (et puis il y avait la nouvelle Star sur M6...)

J'ai préféré continuer de lire "LTI La langue du 3ème Reich" de Victor klemperer lecture qui me paraissait particulièrement adéquate à ce moment...

Et puis un peu de Desnos pour se laver la tête :

Je chante ce soir non ce que nous devons combattre
Mais ce que nous devons défendre.
Les plaisirs de la vie.
Le vin qu'on boit avec les camarades.
L'amour.
Le feu en hiver.
La rivière fraîche en été.
La viande et le pain de chaque repas.
Le refrain que l'on chante en marchant sur la route.
Le lit où l'on dort.
Le sommeil, sans réveils en sursaut, sans angoisse du lendemain.
Le loisir.
La liberté de changer de ciel.
Le sentiment de la dignité et beaucoup d'autres choses
Dont on refuse la possession aux hommes.

SAd___ a dit…

Ouff, tu es revenu :))
nous sommes donc au complet c'est mieux car en effet, La lutte s'annonçe féroce, terrible, impitoyable.
Nos armes, sont des mots. Notre force, c'est la fraternité.
N'ayons pas peur, n'est-ce pas "nous" qui avons raison !?
Bises à tous