lundi 22 janvier 2007

GOUVERNER C' EST AIMER

Il est bien dommage que l'on réduise l'Amour a une affaire privée qui n'a sa place de choix que dans les romans de gare ou les films à l'eau de rose.

Il est vraiment triste de constater à quel point notre société française est devenue vide de sens, vide de pensée, vide d'imagination...

Que lorsque l'on parle de "forces vives" aujourd'hui,à droite comme à gauche hélas, on ne parle que de forces productrices, éventuellement re-productrices.

Mais jamais de l'Amour , de l'amour pour son prochain, qui vous fait lui tendre votre main sans vous soucier de savoir s'il vote jaune rouge ou blanc mais parce qu'il est dans le besoin, de l'amour qui vous fait cacher Rachel et Léo au risque de votre propre vie (il ne s'agissait même plus de confort).

Plus tabou que le cul (sauf lorsqu'il se cache) il y a l'Amour.

Soyez subversif! Parlez d'Amour!

La mort de l'Abbé Pierre tôt ce matin, me ramène à ce constat que je me fais souvent : pourquoi laisser l'Amour, celui qui se trouve dans la fraternité, et pas seulement celui qui existe parfois entre un homme et une femme (de mon point de vue hétéro... ;-)), pourquoi laisser l'amour en dehors de la sphère du politique?
Ne faut-il pas bien aimer pour bien gouverner?

Qu'est-ce qu'aimer? une névrose qui ne se guérit pas ou un don que l'on peut pas s'éviter de faire?

Pouruqoi se fait-on aujourd'hui en France , feu le Pays des Lumières, l'économie de toutes ces réfléxions essentielles?

Sans doute est-ce une des dernières raisons pour lesquelles la religion peut encore faire écho chez certain-e-s d'entre nous: parce qu'elle parle de l'amour même si elle en parle mal!

Pourquoi l'abbé Pierre était le personnage préféré des Français, toutes époques, toutes classes confondues?

Pas seulement parce que c'est un homme de combats et que le combat est respectable surtout s'il est pour une juste cause, mais aussi parce que c'est un homme d'amour, un homme qui parlait d'amour aux Français qui n'en parlent plus, qui n'y réfléchissent plus, comme si la "révolution" (dans le sens d'un tour sur soi-même peut être?) de 68 avait ,dans son aporie, conduit la réflexion sur l'amour à son terme.

Nos philosophes suivent hélas la même voie que nos poètes: ils vont disparaître ,et ils vont disparaître parce qu'ils auront abandonné la question de l'amour comme champ de réflexion privilégié et moyen de réfléxion qui leur était naturellement destiné, alors que l'amour est à la racine même de leur exigence intellectuelle.

Ce sera leur punition pour haute trahison de la mission que la nature leur avait assignée en leur faisant le don de savoir penser et écrire, et ce sera la nôtre aussi pour avoir détourné nos efforts de leurs pas préféré ce qui est facile et rapide et perissable, à ce qui est complexe, long et inestimable.
A nous tous et toutes, une saison en enfer, hélas.

"À quatre heures du matin, l'été,
Le sommeil d'amour dure encore.
Sous les bocages s'évapore
L'odeur du soir fêté.

Là-bas, dans leur vaste chantier
Au soleil des Hespérides,
Déjà s'agitent — en bras de chemise —
Les Charpentiers.

Dans leurs Déserts de mousse, tranquilles,
Ils préparent les lambris précieux
Où la ville
Peindra de faux cieux.

Ô, pour ces Ouvriers charmants
Sujets d'un roi de Babylone,
Vénus ! quitte un instant les Amants
Dont l'âme est en couronne.

Ô Reine des Bergers,
Porte aux travailleurs l'eau-de-vie,
Que leurs forces soient en paix
En attendant le bain dans la mer à midi. "

Arthur RIMBAUD - une saison en enfer

1 commentaire:

Anonyme a dit…

Wah !

Pourquoi donc ne nous parle-t-on pas plus souvent de politique comme ça ?

Bravo.

Si la politique doit être l'art du possible, sa motivation devrait être l'amour d'autrui.