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mardi 13 mai 2008

"LA PART DES LOUPS" de Jann-Marc ROUILLAN

Comme l'a dit quelqu'un d'extrêmement sympathique ici, j'ai donc pris quelques jours de vacances pendant les ponts "comme les riches"...

J'en ai profité pour lire un roman de Jann-Marc ROUILLAN ( ne cherchez pas, oui c'est bien le camarade d'Action Directe) "La part des loups".

Ce roman retrace, des années 1920 à l'orée des années 1950, le parcours d'un homme entre la guerre sociale et la guerre civile, de Barcelone à Toulouse, des plaines d'Aragon à celles de Navarre et d'un côté à l'autre des Pyrénées : comment des paysans pauvres rêvent d'un autre monde, affrontent le pouvoir des propriétaires, de l'Eglise et de l'Etat ; comment ils gagnent, perdent, fuient, s'arrêtent sur un autre front, celui du maquis français contre l'occupant nazi ; comment ils reviennent et perdent encore... Le dernier front de Jaume, guerillero sans troupe, fantôme d'une mémoire qui refuse de capituler, sera de remonter les vieux murs de pierre.

J'ai suivi pas à pas le personnage principal du roman, Jaume, attachée à la semelle de ses espadrilles de brigadiste, dans les rocailles et dans la neige, au milieu des vicissitudes et des saloperies humaines, jusqu'à la fin. Au fil des pages j'ai vu cet homme ses camarades et sa famille être trahis (principalement par les "partis politiques", aimer, se battre, résister, et mourir.

Cela m'a fait découvrir davantage le genre d'Histoire que l'on n'enseigne pas à l'école.

Franco, cette pourriture, est mort l'année de ma naissance. C'est fou de se dire ça et de constater que cette histoire très proche et très contemporaine est totalement passée sous silence à l'école.
Quand elle ne l'est pas, elle est traitée comme un fait divers, presque.

Et pourtant, j'ai eu de bons profs la plupart du temps. Mais trop peu de communistes enseignent l'histoire hélas.

J'ai donc navigué entre l'évocation de l'histoire, très complexe (mais en fait assez simple et répétitive, hélas...) du POUM, du PCE, des anarchistes, des brigades internationales...et la force de Rouillan c'est la beauté de son écriture, la précision de l'évocation, et la philosophie de l'action et de l'engagement armé, dont on sent bien qu'elle sous tend la moindre ligne écrite, sans romantisme et sans complaisance cependant, les années de ce point de vue là ont passé.

D'ailleurs, ne confiait-il pas récemment non seulement ne rien regretter mais continuer à penser que c'était la voie juste (il me semble, mille excuses si ma mémoire est défaillante).

Quand il met dans la bouche de son personnage une remarque: "Nous avons des ennemis devant mais aussi dans notre dos". Comme j'ai compris, comme je me suis sentie proche de Jaume quand il a dit cela... Mais quelle tristesse de voir que nous n'avons rien appris au fond ,et que rien n'a encore changé. Que de travail nous avons.

Et puis j'ai aimé la prise de conscience de la lutte des classes au creux des hanches de "la fille du patron", l'évocation de la nudité, l'amour et le désir qui remettent chaque chose à sa place...

Merci donc à Jann-Marc Rouillan pour ce beau roman, paru chez Agone en 2005 et que je vous recommande (chaudement, forcément) ...