lundi 2 juillet 2007

"NOUS SOMMES INQUIETS"

Texte rédigé par des communistes parisiens.

SOURCE: Bellaciao

La séquence électorale qui s’achève a montré que le Parti communiste peut progresser là où il est capable de défendre une ligne claire et où il bénéficie d’une activité militante de terrain. Ce constat nous permet de poser les questions auxquelles le Parti communiste doit répondre aujourd’hui.

Premièrement, comment tracer une ligne claire, en rupture avec les ambiguïtés des derniers congrès ?

Nous ne voulons plus d’orientation incohérente, visant non à rassembler sur un discours commun, mais à dissimuler les différences en entretenant la confusion. Nous ne voulons plus d’une direction de compromis, dépourvue de la légitimité nécessaire à l’action, et faisant la part belle à tous les discours minoritaires. Le Congrès devra permettre aux militants – et non à des personnalités qui ne représentent qu’elles mêmes – de définir une orientation commune, claire et majoritaire.

Deuxièmement, comment faire en sorte que cette ligne soit mobilisatrice ?

Tout communiste qui a participé avec attention à une Assemblée Générale de section a pu constater que les sensibilités ou tendances qui semblent exister au sein du CN et prévalent trop souvent dans les prises de décision qui en émanent, ne correspondent pas à la réalité militante : il faut donc rompre avec une lecture du Parti fausse et écouter la riche complexité de la pensée des militants. Voilà ce qui nous semble être la seule justification à la tenue d’un congrès en décembre.

Or, pour construire une ligne claire et mobilisatrice, le congrès doit être le lieu d’une élaboration à la fois collective et transparente. C’est pourquoi les dernières déclarations de Marie-George Buffet et du Conseil National suscitent notre inquiétude.

- La dissociation des deux congrès

L’organisation de deux congrès à un an d’intervalle, qui dissocie le choix de la ligne et celui de la direction, peut donner aux militants l’impression d’être écartés des véritables décisions. Ce congrès « extraordinaire » ne serait-il qu’un écran de fumée pour nous faire oublier les défaites et les divisions de ces derniers mois ?

Pour cette raison, nous demandons à ce que les deux congrès annoncés en décembre 2007 et fin 2008 soient annulés et remplacés par un congrès en décembre 2007, avec une organisation conforme aux statuts adoptés en 2006.

Cela passe par l’élaboration collective d’une ligne à partir d’une base commune votée puis amendée par les militants et par la remise en jeu de tous les postes de direction. Soulignons que ceci nécessite une véritable réflexion sur la nature du rôle de la direction, ainsi que sur les modes de son élection.

- Le congrès et la recomposition de la gauche (PS, Les Verts)

Autre façon de négliger les militants, remplacer les véritables questions qu’ils se posent après ces années difficiles par le débat sur la recomposition de la gauche.

Cette question est à l’ordre du jour dans les médias. Elle nous vient du Parti Socialiste, qui s’y cherche une raison d’être, des expériences européennes dont les succès électoraux répondent à nos échecs, et du sein même de notre Parti, où, en l’absence de ligne et de direction, les esprits s’égayent et rêvent, qui d’un PCF nouveau, qui d’un grand parti de gauche ou d’extrême gauche, offrant aux médias l’image d’un désordre que l’on espère créateur.

Nous ne pouvons ignorer cette question, mais pour y répondre clairement, nous devons partir de nos propres interrogations, de notre propre expérience de communistes.

Cette expérience n’est pas celle du « déclin structurel » évoqué par Marie-George Buffet dans son rapport, mais celle de l’échec – et parfois, aux législatives, du succès – de différentes stratégies.

C’est pourquoi nous affirmons qu’en aucun cas la disparition du Parti Communiste, comme structure ou comme nom, ne doit être considérée comme une solution.

Le problème est stratégique et politique avant d’être formel. Le PCF est un outil au service d’hommes et d’idées. À qui servons-nous ? Quelles idées défendons-nous ? Ce sont ces questions qu’il faut trancher.

Les interrogations sur cette fameuse « recomposition » semblent parfois vouloir camoufler les véritables questions des communistes, au risque de refuser, encore une fois, de débattre des problèmes les plus essentiels. Tentons donc de construire une réflexion dont le point de départ ne serait pas les problèmes imposés de l’extérieur mais les expériences et les doutes des militants communistes.

- Le questionnaire

Le relevé de décision du dernier CN évoque un « questionnaire, adressé à tous les membres du PCF d’ici à octobre visant à mieux appréhender leur point de vue ». Nous avons deux objections.

Premièrement, si le système des amendements et des bases communes péchait par son manque de transparence, ce questionnaire ne permet toujours pas de résoudre le problème. En effet, qui concevra le questionnaire ? Qui le dépouillera ? Avec quelle méthode ?

Deuxièmement, la démarche même du questionnaire, la nature de ce type de consultation, conduit à additionner des positions individuelles plutôt qu’à construire collectivement une position commune. Seuls le dialogue et l’élaboration collective peuvent nous libérer de la pensée spontanée et de l’idéologie dominante. En outre, l’addition de positions individuelles ne peut qu’exacerber les divisions du Parti au lieu de les dépasser dans la construction d’un discours commun.

Pourquoi ne pas utiliser les lieux de discussion existant dans le Parti, la cellule, la section, les conseils départemental et national, pour permettre à chacun d’enrichir la pensée de tous, et ce tout au long de l’année ?

- Le vaste débat populaire

Toujours dans le relevé de décisions du CN, nous lisons qu’« à l’échelle nationale comme locale, la création d’espaces d’échange et de confrontation, de forums ou de groupes de travail initiés par le Parti communiste ou d’autres, favoriseront la participation de tous les communistes, de tous les progressistes qui le désirent à cet effort partagé » (sic).

Il faut prendre garde à ne pas voler ce congrès aux militants communistes, à force d’ « ouverture » et de « grands débats populaires ». Nous avons besoin d’élaborer ensemble le communisme de demain. Ne laissons pas des experts trancher les débats des communistes. Ce serait le meilleur moyen de les démobiliser. Construisons un discours communiste, que nous pourrons ensuite proposer, partager, et faire évoluer.

Pour reprendre en détails la proposition qui nous est faite : « au niveau local », « l’échange et la confrontation » font déjà le quotidien de notre militantisme.

Les sympathisants communistes ou progressistes sont nos interlocuteurs sur les marchés, lors des initiatives hebdomadaires et jusque dans nos assemblées générales qui leur sont le plus souvent ouvertes.

En revanche, l’idée que des individus ou des organisations extérieurs au PCF puissent animer des discussions sur nos questions de congrès nous semble aberrante.

Ainsi, accepterions-nous que des militants ou des citoyens, actifs dans la campagne contre Marie-George Buffet au nom de l’effacement du PCF, puissent aujourd’hui imposer de l’extérieur leur position aux militants communistes ?

C’est aux militants de décider de l’avenir du PCF – libre à tous ceux qui le souhaitent d’adhérer.

Quant au niveau national, la proposition du CN laisse présager la création d’une structure rassemblant des personnalités d’horizons différents (structure qui serait du type « collectif national » ou « comité de campagne »).

Comment imaginer qu’une telle structure s’en tiendra à l’animation des débats sans empiéter sur les décisions qui relèvent de la souveraineté des adhérents ? En outre, comment définir nos partenaires (qui sont les « communistes et progressistes » ?) alors que cette définition est l’enjeu principal du congrès ? Il est donc difficile de ne pas voir dans cette proposition d’organisation du congrès les signes de la volonté d’imposer par avance des réponses qui n’auront malheureusement rien de nouveau.

Pour finir, nous sommes convaincus que la véritable démocratie ne peut se passer de règles, et qu’elle fonctionne d’autant mieux que ces règles sont comprises par tous. En changeant de mode de fonctionnement à chaque Congrès depuis plus de dix ans, les directions successives du Parti contribuent à rendre le fonctionnement du Congrès opaque et incompréhensible. Tenons-nous en à nos statuts, même s’ils sont imparfaits, améliorons-les progressivement, avec prudence, et ainsi nous donnerons les moyens aux militants de comprendre les règles du jeu et de s’en emparer.

- Les élections municipales et cantonales

Comme en passant, le relevé de décisions du CN indique que « la préparation des élections cantonales et municipales fera l’objet d’un CN spécifique en septembre ». Les militants communistes ont donc les deux mois d’été pour se remettre des campagnes qui s’achèvent, préparer la Fête de l’Humanité, répondre au fameux questionnaire, et s’il leur reste du temps, se poser la question des alliances opportunes pour les prochaines échéances électorales. Ne parlons même pas des mesures anti-sociales de la droite et des luttes qu’il faudra bien mener.

Ce calendrier rend manifestement impossible la participation des communistes aux décisions qui les concernent.

Il est peu probable que les militants se mobiliseront pour défendre des décisions qu’ils n’auront pas prises et des candidatures qu’ils n’auront pas choisies.

Nous affirmons, puisqu’il semble qu’il soit nécessaire de le faire, que le choix de nos candidats n’est pas une mince affaire qui doit se régler en un CN. Il est urgent d’y réfléchir, et les décisions doivent être prises au moins en octobre afin de pouvoir mener la campagne correctement.

Voilà pourquoi nous espérons que les militants donneront la priorité aux luttes sociales et électorales à mener et à la réflexion collective qu’elles permettent de construire.

Voilà pourquoi nous demandons la tenue d’un seul congrès, conforme à nos statuts qui se donne pour but de définir une ligne politique claire et mobilisatrice, élaborée collectivement par les adhérents du PCF, et de choisir une direction pour l’appliquer.

Sont rédacteurs et signataires de ce texte des militants communistes parisiens, par ordre alphabétique :

Jonathan Chenal (secrétaire de cellule dans le 19e arrondissement), Gilles Gourlot (militant PCF 20e), Stéphanie Loncle (PCF 11ème), Astrée Questiaux (militante PCF 20ème – Responsable UEC Sorbonne), Pasquale Noizet (Conseil départemental Paris - CA et CE du PCF 20ème), Gilles Questiaux (CE PCF 20ème), Olivier Ritz (PCF 12ème), Marine Roussillon (PCF 5ème), Agnès Schwab (PCF 5e).

Nouveaux signataires
Amar BELLAL (PCF 20é), Elodie TUAILLON (PCF 17è), ...

4 commentaires:

@Caius a dit…

tout cela me parait de bon sens et une base minimale pour organiser une discussion sérieuse...

jean claude des landes a dit…

J'ai l'impression que nous n'avons pas lu le même rapport.Alors je résume:3 exigences pour le débat:sincérité,honnêteté,souveraineté des communistes,le débat de "lignes" et de "sensiblités" doit céder la place au débat d'idées.Exigence du respect des déçisions prises ensemble.
Dissociation du choix de la ligne et de la direction?ou avez vous lu ça?"nous devons aborder la question de la direction nationale et de ma propre responsabilité.Pouvons nous aller jusqu'au congrés ordinaire de 2008 sans bouger?personnellement je ne le pense pas"Rapport de Marie George.
Il faut impliquer le plus grands nombres de communistes,donc,pour moi,les formes conférences de sections,fédérales sont obsolétes.Assemblées générales me semble plus adaptées.Et associer des proches à cette réflexion,s'ouvrir,sachant que le dernier mot restera aux militants et aux adhérents.
mois c'est court pour tous faire?je me souviens d'un temps que les moins de 20 ans ne peuvent pas connaitre,ou nous aurions dit:nous avons du temps!
Et l'action n'a jamais empêchée de penser:la réflexion nourrit l'action,et la réflexion nourrit l'action.
Vous êtes inquiets?moi aussi mais surtout sur ce que Sarko nous prépare.Je suis un peu enthousiaste?mais sans enthousiasme allons nous entrainer les autres!
La "recomposition de la goche"?je m'en fout je ne suis pas de "goche" je suis communiste,et je connais un certains nombre de militants et de sympatisants qui s'en tapent comme de leur premiére chemise,leur probléme c'est:que faire?comment?sous quelle forme.
Le sigle PCF est la pour longtemps à nous de le faire vivre.Revenir aux fondamentaux tout en s'élargissant quel défi!
Et surtout écoutons nous,ne pensons pas avoir raison CONTRE mais AVEC les autres camarades.
Et je vous dis ma confiance en vous,dans les militants,dans leur volonté de changement,d'aller de l'avant,de trouver des solutions et les réponses à nos questions.
Amitiés à tous
Jean Claude des Landes.Ouvrier PCF
sp:si vous passez par les Landes autour du 6,7 et 8 juillet venez à la fête des Pins à Tarnos,débats,spectacles,bonne bouffe et des tas de camarades vous y attendent

SAd___ a dit…

Je signe ce texte, quoi que je goute peut "les inquiets" j'aurai plutôt tendance à penser en effet, qu'il nous faut tout simplement être "Meilleurs" ;-)

La situation actuelle oblige à la créativité. Il est vain de désigner tel ou tel comme responsable « d’échecs », alors qu’il s’agit d’un problème de maîtrise collective de phénomènes qui animent l’ensemble de la société.
A la haine personnalisée ne faut-il pas – y compris pour le droit à la critique – préférer l’analyse et l'inteligence de propositions en regard des convulsions du monde capitaliste ? Car ces biens ces dimensions globale qui engendre les fluctuations les variables, les aléas au niveau électoral.
S’il y a quelque chose de nouveau à envisager comme critique constructive , c’est peut-être le fait que les orientations et les activités d’un parti de transformation révolutionnaire de la société ne peuvent dépendre des seules variables électoral. Certes ces variables sont des indicateurs incontournables dans le débat démocratique, pour apprécier le niveau de conscience des individus, la solidité de l’engagement citoyen, ... . Mais chacun sait combien l’immédiat, l’événementiel, l’émotionnel, le spontanéisme humain l’emporte souvent sur une vision de longue durée.
Or le communisme peut-il se concevoir autrement que dans la durée, prenant en compte tout les éléments évolutifs de la société à l’échelle de la planète ? Exemple :
En passant de l’ancien concept correspondant à un moment de l’histoire : « Prolétaire de tous les pays unissez-vous ! » à une dimension d’un nouveau type : « peuples du monde entier unissons nos forces pour l’intérêt commun ! ».
A l’échelle européenne (et mondial, ou même nationale), ne voit-on pas – y compris dans les institutions actuelles – émerger fortement la nécessité de la notion d’intérêt commun », pour affronter les problèmes de l’immédiat et de l’avenir ?
De l’avenir de la planète et des dépenses utiles pour la recherche ; Les mesures contre le réchauffement de la planète, ; le traitement par la coopération des déséquilibre alimentaire et injustice de tout ordres ; l’utilisation de l’énergie (l’accès à -), des transports en commun ; l’exploitation de l’eau ; la course aux armements , ... ;
Ces éléments supposent de combattre le profit capitaliste et donc le système capitaliste lui-même avec son arsenal économique mais aussi juridique, social, intellectuel, culturel.
Objectivement, « intérêt commun » et « communisme » ne sont-ils pas indissociables à l’échelle d’une lutte contre l’égoïsme de classe au niveau mondial ?
Ce qui justifie un parti transformateur, pour exprimer les différentes formes de cette réalité et les propositions susceptible de modifier en permanence cet état de chose, par l’action quotidienne. Or ce ne sont ni les Verts, ni le parti socialiste ni les gauchiste de la LCR (ou de LO) qui peuvent en être totalement porteurs.
Et ce ne sont pas les aléas électoraux quelque soit leur importance qui doivent modifier une conduite durable d’un parti de transformateurs, s’appuyant sur des fondamentaux construit et enrichis constamment par les sciences, les techniques, la culture, l’économie, la philosophie, l’histoire des sociétés et de ses luttes quotidiennes. Un parti non pas scientiste, ou guide des consciences mais porteur de conscience laïque, de longue durée, nécessaire à l’action des individus pour transformer à la base la société. Donc « un parti pas comme les autres » est nécessaire. Là, peut-être une parenthèse s’impose quand à l’ancienne formule « un parti comme les autres : », formule adoptée dans un contexte particulier d’auto défense face à l’accusation de stalinisme.
Ainsi l’adhésion individuelle et volontaire pour une activité militante suppose une rencontre consciente et passionnelle pour dépasser les limites individuelles, enrichir le collectif et s’en enrichir.
Cette adhésion à un parti transformateur, en réaction aux conséquences diverses du système capitaliste ne peut être mise sur le même plan que toutes les autres formes d’activités. Elle a sa spécificité, même si elle s’inscrit non marginalement mais avec la « gauche » et les forces « sociales » pour une évolution général de la société.
« Communisme », « intérêt commun », « un parti pas comme les autres » , ne sont-ils pas des éléments indissociables dans une réflexion prospective d’un parti qui justement à sa raison d’être quoique l’on puisse en dise par ailleurs ?

Fraternellement

Anonyme a dit…

Jean-Claude : le rapport de MGB est une chose, le relevé de décisions en est une autre...