vendredi 11 mai 2007

AMOUR - Extraits de "Lettre à D." D'André Gorz

Un petit bagage de grand Amour comme viatique pour ce week end.
J'espère que vous vous régalerez comme je me suis régalée dans ces lignes
A bientôt - Osémy


« Tu vas avoir 82 ans. Tu as rapetissé de 6 centimètres, tu ne pèses que 45 kilos et tu es toujours belle, gracieuse et désirable.
Cela fait cinquante-huit ans que nous vivons ensemble et je t’aime plus que jamais. Je porte de nouveau au creux de ma poitrine un vide dévorant que seule comble la chaleur de ton corps contre le mien (…)
J’ai besoin de reconstituer l’histoire de notre amour pour en saisir tout le sens. C’est elle qui nous a permis de devenir qui nous sommes, l’un par l’autre et l’un pour l’autre. Je t’écris pour comprendre ce que j’ai vécu et ce que nous avons vécu ensemble (…).
Avant de te connaître, je n’avais jamais passé plus de deux heures avec une fille sans m’ennuyer et le lui faire sentir. Ce qui me captivait avec toi c’est que tu me faisais accéder à un autre monde. Les valeurs qui avaient dominé mon enfance n’y avaient pas cours. Ce monde m’enchantait. Je pouvais m’évader en y entrant, sans obligation ni appartenance. Avec toi j’étais « ailleurs », en un lieu étranger, étranger à moi-même. Tu m’offrais l’accès à une dimension d’altérité supplémentaire, à moi qui ai toujours rejeté toute identité et ajouté les unes aux autres des identités dont aucune n’était mienne (…).
Rien ne peut rendre compte du lien invisible par lequel nous nous sommes sentis unis dès le début. Nous avions beau être profondément dissemblables, je n’en sentais pas moins que quelque chose de fondamental nous était commun, une sorte de blessure originaire (…) : l’expérience de l’insécurité.
La nature de celle-ci n’était pas la même chez toi et chez moi. Peu importe : pour toi comme pour moi, elle signifiait que nous n’avions pas dans le monde une place assurée. Nous n’aurions que celle que nous nous ferions (…).
J’ai toujours senti ta force en même temps que ta fragilité sous-jacente. J’aimais ta fragilité surmontée, j’admirais ta force fragile. Nous étions l’un et l’autre des enfants de la précarité et du conflit.
Nous étions faits pour nous protéger mutuellement contre l’une et l’autre. Nous avions besoin de créer ensemble, l’un par l’autre, la place dans le monde qui nous était originellement déniée (…)
Ma route a été longue pour que ces évidences vécues se fraient un chemin dans ma façon de penser et d’agir (…)
Nous pouvions presque tout mettre en commun parce que nous n’avions rien au départ. Il suffisait que je consente à vivre ce que je vivais, à aimer plus que tout ton regard, ta voix, ton odeur, tes doigts fuselés, ta façon d’habiter ton corps, pour que tout l’avenir s’offre à nous. (…)
Avec toi, je pouvais mettre ma réalité en vacances. Tu étais le complément de l’irréalisation du réel. Tu étais porteuse pour moi de la mise entre parenthèse du monde menaçant dans lequel j’étais un réfugié à l’existence illégitime, dont l’avenir ne dépassait jamais trois mois. Aussi loin que je me souvienne, j’avais toujours cherché à ne pas exister. Tu as du travailler des années durant pour me faire assumer mon existence (…)
Je n’ai pas découvert, comme je le fais ici, quel était le socle de notre amour. Ni que le fait d’être obsédé, à la fois délicieusement et douloureusement, par la coïncidence toujours promise et toujours évanescente de nos corps renvoie à des expériences fondatrices plongeant leurs racines dans l’enfance. (…) C’est cela : la passion amoureuse est une manière d’entrer en résonance avec l’autre, corps et âme et avec lui ou elle seuls. Nous sommes en deçà et au-delà de la philosophie(…) »

André GORZ « Lettre à D. » Ed. Galilée, 2006

7 commentaires:

SAd___ a dit…

Un peut de tendresse, beaucoup d'amour, et le souffle des poètes.
Voilà du bon pain pour le week-end et plus :))

bises

Anonyme a dit…

Puisque persone t’écrit, j’me dévoue, ca m’glace cette page blanche… bon, cétait pour te dire aussi : c’est con que t’es pas candidate dans le XVIe, t’avais toutes tes chances.
Clémentine

Anonyme a dit…

"J’ai besoin de reconstituer l’histoire de notre amour pour en saisir tout le sens."

j ai besoin de comprendre l histoire de notre rencontre pour en tirer toute la quintessence

je ne vais pas recopier tous le texte
je l ai lue au moins 30 fois
a l endroit a l enver de coté au dessus en dessous en le tournant au feminin au masculin
bref j ai tous fais , et ce serai mentir que de dire autre chose que
ouahhhhhhhhhhhhh
il y a des gens ici qui auront "l audace intellectuel" de trouver un autre terme, un terme plus "adequat" un terme plus "reflechie"
un terme plus "louvien"
mais non messieurs le seule terme qui puisse accompagner ce texte est
ouahhhhhhhhhhhhhhhhh

merci la louve d etre ce que tu es
merci pour ce texte qui est juste parfait et que je partage pleinement merci MADAME avec un grand M
celui ou celle qui a la chance d etre aimé par une personne comme ca
(je parle du texte bien sur ;-)
peut mourir tranquille ,il ou elle aura touché "la grace amoureuse"
bon week end

bernard T

Osemy a dit…

Chère "Clémentine" , ton bon coeur te perdra, c'est sûr...

Un petit conseil toutefois pour tes prochaines interventions publiques (ici ou ailleurs): reprends ton Bescherelle, car on ne dit pas "c'est con que T'ES pas candidate" mais plutôt "c'est con que tu ne sois pas candidate"...

Enfin,je dis ça comme ça, parce que, moi aussi, j'ai bon coeur.

Au plaisir de te lire!

Osémy

Anonyme a dit…

il y a des gens ici qui auront "l audace intellectuel" de trouver un autre terme, un terme plus "adequat" un terme plus "reflechie"
un terme plus "louvien"
mais non messieurs le seule terme qui puisse accompagner ce texte est
ouahhhhhhhhhhhhhhhhh


putain lui il est bien a fond!!
t'as la classe la louve,ils bavent tous c'est dingue ça

xxxxxxxxxxxxx

@Caius a dit…

« A quoi bon des poètes en ce temps de détresse ? » Hölderlin

En 356 avant notre ère, la florissante cité grecque d’Ephèse, est le théâtre d’une catastrophe : le temple d’Artémis, une des sept merveilles du monde, est détruite par un incendie criminel.
L’auteur du forfait ne tarde pas à se faire connaître : c’est un Ephésien nommé Erostrate, qui a renoncé à la poésie et cherché un moyen plus sûr de se faire connaître.

Il est mis à mort. Après son exécution, il fut interdit, sous peine de mort, de citer son nom afin de le priver de la gloire posthume qu'il cherchait.

Anonyme a dit…

DROIT DE REPONSE
cher(e) xxxxxxxxx
par quoi commencer ma reponse
j hesite entre "super" ou alors "double super"
avec c mots je suis sur de pas me faire censurer par la patronne des lieux mais je te laisse le choix de les remplacer par ceux que tu aura choisi
non je ne suis pas a "fond sur la louve"
et d ailleur si telle etai le cas quel serai le probleme ??? bon bref
je disais juste que ce texte etais vraiment tres beau rien de plus , je remerciais la louve d avoir mis en ligne un texte qui avait pour moi un vrai sens , il me faisait penser a quelqu'un
mais ça cher(e) xxxxxxxxx ça te depasse surement tu prefere t arretez au details , c est pas grave .alors je te dit tinkiet et change rien toi aussi t es au top

bernard T