mercredi 4 février 2009

LE PROGRAMME MILITAIRE DE LA REVOLUTION PROLETARIENNE - 1916 , par V. Lénine (extraits)

"(...) II.

A cela vient s’ajouter la considération d’ordre général que voici :

Une classe opprimée qui ne s’efforcerait pas d’apprendre à manier les armes, de posséder des armes, ne mériterait que d’être traitée en esclave.

Car enfin nous ne pouvons pas oublier, à moins de devenir des pacifistes bourgeois ou des opportunistes, que nous vivons dans une société de classes, dont on ne peut sortir autrement que par la lutte de classes.

Dans toute société de classes, qu’elle soit fondée sur l’esclavage, sur le servage ou, comme aujourd’hui, sur le salariat, la classe des oppresseurs est armée.

De nos jours, non seulement l’armée permanente, mais aussi la milice — même dans les républiques bourgeoises les plus démocratiques, comme la Suisse — constituent l’armement de la bourgeoisie contre le prolétariat.

C’est une vérité tellement élémentaire qu’il n’est guère besoin de s’y arrêter spécialement. Il n’est que de rappeler l’usage qui est fait de la troupe contre les grévistes, dans tous les pays capitalistes.

L’armement de la bourgeoisie contre le prolétariat est l’un des faits les plus importants, les plus fondamentaux, les plus essentiels de la société capitaliste moderne.

Et l’on vient, cela étant, proposer aux social-démocrates révolutionnaires de «revendiquer» le «désarmement» !

Ce serait là renier intégralement le point de vue de la lutte de classe et renoncer à toute idée de révolution. Notre mot d’ordre doit être : l’armement du prolétariat pour qu’il puisse vaincre, exproprier et désarmer la bourgeoisie. C’est la seule tactique possible pour une classe révolutionnaire, une tactique qui résulte de toute l’évolution objective du militarisme capitaliste et qui est prescrite par cette évolution.

C’est seulement après que le prolétariat aura désarmé la bourgeoisie qu’il pourra, sans trahir sa mission historique universelle, jeter à la ferraille toutes les armes en général, et il ne manquera pas de le faire, mais alors seulement, et en aucune façon avant.

Si la guerre actuelle provoque chez les socialistes chrétiens réactionnaires et les petits bourgeois pleurnichards uniquement de l’épouvante et de l’horreur, de la répulsion pour tout emploi des armes, pour le sang, la mort, etc., nous avons le devoir de dire : la société capitaliste a toujours été et demeure en permanence une horreur sans fin.

Et si maintenant la guerre actuelle, la plus réactionnaire de toutes les guerres, prépare à cette société une fin pleine d’horreur, nous n’avons aucune raison de tomber dans le désespoir.

Or, objectivement parlant, c’est très exactement se laisser aller au désespoir que de «revendiquer» le désarmement — ou, plus précisément, rêver de désarmement — à une époque où, au vu et au su de tout le monde, la bourgeoisie elle-même prépare la seule guerre véritablement légitime et révolutionnaire, à savoir la guerre civile contre la bourgeoisie impérialiste.

A qui dira que c’est une théorie détachée de la vie, nous rappellerons deux grands faits historiques de portée mondiale : d’une part, le rôle des trusts et du travail des femmes dans les fabriques ; d’autre part, la Commune de Paris de 1871 et l’insurrection de décembre 1905 en Russie.

C’est l’affaire de la bourgeoisie de développer les trusts, de rabattre vers les fabriques les enfants et les femmes, de les y martyriser, de les pervertir, de les vouer au pire dénuement.

Nous ne «revendiquons» pas ce genre de développement, nous ne le «soutenons» pas, nous luttons contre lui.

Mais comment luttons-nous ? Nous savons que les trusts et le travail des femmes dans les fabriques marquent un progrès. Nous ne voulons pas revenir en arrière, à l’artisanat, au capitalisme prémonopoliste, au travail des femmes à domicile. En avant, à travers les trusts, etc., et au-delà, vers le socialisme !

Ce raisonnement est applicable, en opérant les changements nécessaires, à la militarisation actuelle du peuple.

Actuellement, la bourgeoisie impérialiste militarise, non seulement l’ensemble du peuple, mais même la jeunesse. Demain, elle entreprendra peut-être de militariser les femmes. Nous devons dire à ce propos : tant mieux ! Qu’on se hâte ! Plus vite cela se fera, et plus sera proche l’insurrection armée contre le capitalisme. Comment les social-démocrates pourraient-ils se laisser effrayer par la militarisation de la jeunesse, etc., s’ils n’oubliaient pas l’exemple de la Commune de Paris ?

Il ne s’agit pas ici d’une «théorie détachée de la vie», d’un rêve, mais d’un fait. Et ce serait la pire des choses, en vérité, si les social-démocrates, en dépit de tous les faits économiques et politiques, en venaient à douter que l’époque impérialiste et les guerres impérialistes doivent nécessairement amener le retour de pareils faits. (...)"

A suivre en intégralité ici

Aucun commentaire: